Chaque année à cette période, je vous propose de faire un point sur les tendances, évolutions et permanences des pratiques de recrutement.

Ce point n’est pas le résultat d’enquêtes statistiques, mais de nos activités de conseils en entreprises et auprès des personnes individuellement sur id-carrières, de nos observations et analyses, de nos échanges avec d’autres professionnels RH, marketing, IT…

Le rythme des innovations technologiques est rapide. Notre parti pris est davantage de partager les pratiques et les tendances qui peuvent être utiles pour conduire concrètement une recherche d’emploi et un recrutement.

Que retenons-nous de cette année 2013 en matière de recrutement et de recherche d’emploi ?

 recrutement 2013

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L’annonce et le CV, toujours au top des usages…

 

Nous avions écrit un article sur le pouvoir de l’annonce pour les candidats. L’annonce d’emploi reste aussi un canal privilégié par les entreprises pour recueillir des candidatures, y compris sur les réseaux sociaux.

Sur ces derniers, l’annonce s’intègre dans une communication plus large de l’entreprise. Les candidats peuvent recueillir des informations complémentaires en un même lieu (page de l’entreprise, profils des collaborateurs et ex-collaborateurs de l’entreprise, lien avec le site carrière, etc.), et interagir de plus en plus avec le recruteur et des salariés de l’entreprise.

Cette configuration présente un double intérêt pour l’entreprise qui recrute :

  • stimuler l’intérêt de candidats cibles,
  • promouvoir son image d’employeur, au-delà du poste à pourvoir et des candidats intéressés… et son image d’entreprise plus globalement.

A lire l’article de Franck Lapinta La marque commerciale pour attirer les candidats ou mon billet sur le blog Experts Quand la RSE rencontre la Marque Employeur ?  

 

Le CV en format word ou PdF reste par ailleurs le support le plus utilisé par les candidats, en réponse à une annonce ou en spontanée, même lorsqu’ils ont la possibilité de candidater via leur profil Viadeo ou LinkedIn.

Gilles Gobron d’Expectra a communiqué des chiffres intéressants lors de la conférence Recrutement Mobile et Social organisée par Link Humans France :

Sur 120 000 candidatures traitées et dans un processus qui permet de candidater via son profil social,

  • le CV word ou pdf représente 92,5% des candidatures reçues,
  • Viadeo 4,3%,
  • Linkedin 2,36%
  • Le CV DoYouBuzz 0,84%.

Au-delà des habitudes, la possibilité de personnaliser le CV pour chaque offre d’emploi explique ce choix, selon Gilles Gobron. Et pour Alexandre Pachulski de Talentsoft, le CV word ou Pdf reste intéressant par les informations qu’il donne sur la personnalité du candidat. Et ce, en comparaison des profils sur les réseaux sociaux plus formatés. Point de vue intéressant compte tenu que les profils sociaux sont souvent présentés comme plus riches que le contenu classique du CV (relations en quantité et en nature, recommandations, lectures, présentation, interactions…).

Les candidats ne doivent cependant pas oublier que le réseau est un canal plus efficace de recherche d’emploi, notamment dans un période où il y a moins d’offres d’emploi. Et les plateformes sociales sont aujourd’hui pour tous des outils efficaces de réseautage.

 

La cooptation, le meilleur du recrutement !

 

La cooptation de candidats par les salariés de l’entreprise n’est pas une démarche nouvelle, mais elle est redécouverte et remise à l’honneur dans le cadre d’un recrutement conduit en réseau. La cooptation contribue à identifier des profils qualifiés et à recruter des collaborateurs davantage en phase avec l’entreprise, ce qui réduit le risque de départ prématuré. Pour les candidats, le développement de la cooptation comme canal de recrutement doit les inciter à développer leur démarche réseau. Comment les entreprises recrutent en 2013 ? 

Nous y consacrerons prochainement un article.

 

L’expérience-candidat au milieu du gué

 

La conférence RMS avait cette année pour sujet central : l’expérience de recrutement des candidats ou expérience-candidat.

Tout le monde s’accorde à dire que l’expérience de recrutement proposée par l’entreprise aux candidats est créatrice de valeurs pour l’entreprise.

Elle renforce sa capacité à attirer des profils passifs et actifs. Elle contribue à sécuriser la réponse finale du candidat retenu (le recruteur et le point d’inflexion) et son intégration. Elle contribue à l’image et la réputation de l’entreprise pour les besoins du recrutement et au-delà.

En revanche, la nature et le niveau de qualité de l’expérience-candidat à offrir est encore beaucoup débattue. Pourquoi ?

  • L’importance du vécu du candidat s’exprime dans un contexte durable de difficultés de recrutement pour les entreprises, donc de concurrence pour certains profils, mais aussi de chômage de masse.
  • L’importance du vécu du candidat s’exprime dans un nouveau contexte de communication, d’expression et d’interaction, modelé par les médias sociaux. Il s’impose à toutes les entreprises, mais les marques à forte notoriété y sont plus exposées.
  • Le vécu du recrutement par les candidats s’est globalement dégradé depuis l’informatisation du recrutement fin des années 90 (massification, standardisation, etc.). Les difficultés d’emploi renforcent le mécontentement. Les profils convoités renforcent leurs exigences. Mécontentement et exigences s’expriment davantage publiquement…

 

A quels besoins des candidats doit répondre une expérience-candidat satisfaisante ? Les attentes du candidat

Il me semble globalement et en premier lieu : le respect. Il s’exprime à travers la considération et l’attention, la gestion plus humaine du candidat, davantage d’interactions directes entre individus, la personnalisation, les informations communiquées, la transparence, une exigence utile dans la sélection, un effort à produire proportionnel à l’objectif visé, etc.

Les technologies et les outils peuvent y contribuer. Améliorer le vécu du recrutement doit d’abord être pour l’entreprise une volonté stratégique et une valeur à partager dans toute l’organisation. Revisiter ses processus de recrutement et améliorer les points de contacts avec les candidats demande aussi de la créativité, compte tenu des contraintes de ressources.

 

Un fil à trouver : de l’innovation technologique au besoin?

 

Les observations sur la prépondérance de l’annonce et du CV ou sur les questionnements de l’expérience -candidat sont intéressants à plusieurs titres.

Elles confirment notamment que les innovations technologiques ne parviennent pas à transformer les usages, comme l’évoquait Antoine David de Social City Media lors de la RMS à propos du mobile. Recrutement mobile : quel usage, quelle utilité ? 

Certes l’adoption d’une innovation demande un temps d’acceptation, d’adoption, de formation… c’est le « oui, mais » de Laurent Brouat de Link Humans dans la « battle » organisée par Expectra, inspiré d’un de nos billets sur le recrutement et les réseaux sociaux.

Mais l’innovation doit surtout apporter une amélioration ou une nouvelle valeur, perçue par l’utilisateur. C’est ce qui en motivera l’adoption et en fera peut-être une pratique de référence.

  • Pour le recruteur, il s’agirait d’identifier les candidats cibles, les connaitre et prédire leur performance, le tout dans un temps et avec des moyens définis.
  • Pour le candidat, il s’agirait d’identifier les opportunités d’emplois cibles, intégrer la sélection pour pouvoir valoriser ses motivations et compétences et obtenir une réponse, positive ! . Ici aussi avec des contraintes de temps et de moyens (individuels).

 

Il me semble que 2 éléments ne sont pas suffisamment pris en compte dans les innovations proposées et dans leur appréciation par nous tous :  

1- La segmentation des besoins adressés par les innovations de recrutement. Notre communication des innovations laisse toujours penser qu’elles s’appliquent à tout et à tout le monde. D’où la difficulté à faire un point objectif sur leurs réels apports et les faux débats…

On ne recrute pas 1200 jeunes diplômés par an dans un groupe international réputé comme on recrute 3 ou 4 personnes par an dans une PME régionale moins connue. On ne recherche pas un emploi de directeur commercial dans une société internationale comme on recherche un emploi de dessinateur-projeteur dans une PME lyonnaise, etc. Et la comparaison s’applique aussi à 2 groupes internationaux du même secteur, 2 PME du même secteur et de la même région, 2 directeurs commerciaux internationaux, 2 techniciens de BE.

2- L’évaluation des innovations au regard des besoins fondamentaux des acteurs.

Les innovations sont absorbées parfois dans des pratiques existantes sans générer d’innovations de process. L’exemple des réseaux sociaux qui sont devenus des jobboards et des CVthèques est intéressant.Les réseaux sociaux des CVthèques à ciel ouvert au bénéfice de qui ? 

C’est aussi le cas des dispositifs mobiles actuellement, avec un air de retour au e-recrutement décrié pour ses automatismes réducteurs Trouver un job en un clic : la nouvelle promesse de recrutement ?

Parmi ces besoins fondamentaux des recruteurs et des candidats, il me semble que l’on pourrait retenir :

  • Identifier les cibles (définition du besoin, les profils, les emplois, etc. )
  • Accéder/Diffuser des informations auprès des cibles,
  • Mettre en relation et gérer cette relation.

Sur ces 3 objectifs, les recruteurs et les candidats ont toujours, me semble-t-il, des attentes de facilitation, de qualité et de productivité. 

Un triple filtre pour évaluer la proposition de valeur d’une innovation, à condition de la repositionner aussi dans une vision globale d’un processus de recrutement donné.

Le mode de sélection ne me semble pas être au centre des besoins fondamentaux, elle n’est qu’un corollaire ou une conséquence des 3 éléments cités. Pourtant elle attire beaucoup l’attention de l’innovation.

Les technologies et les concepts qui les accompagnent actuellement (Réseaux sociaux, Personnal Branding, Marque Employeur, Expérience-Candidat, outils spécialisés dans le sourcing ou la sélection, etc. ) ne font pas une stratégie de recrutement ou de recherche d’emploi. Et des processus performants pour la concrétiser.

Les technologies peuvent seulement contribuer à construire une solution, adaptée aux besoins et aux stratégies de chaque entreprise, une réponse aux besoins par nature spécifique.

S’il existe de bonnes pratiques et surtout de bons réflexes qui émergent des expérimentations des uns et des autres, la capacité à faire émerger la solution efficace pour soi et à l’exécuter avec agilité est clé. C’est vrai pour les candidats et pour les entreprises.

 

De l’innovation aux moyens d’innover ?

 

La question des moyens financiers et humains n’est pas souvent évoquée. A l’exception de quelques start-up, ce n’est pas un hasard si les grandes entreprises sont davantage à la pointe des innovations et des expérimentations en matière de recrutement.

Leurs besoins et enjeux de recrutement expliquent certes une allocation spécifique de ressources, mais plus globalement leur structure permet aussi de mobiliser autrement leurs ressources. Ce que peu de PME peuvent faire.

Or les nouvelles technologies se caractérisent à la fois par une nouvelle gestion des relations et par une amplification des interactions et des flux d’informations. Elles mobilisent donc davantage les moyens humains de l’entreprise, en interne comme en externe, et nécessitent aussi de nouveaux outils. La notion de salarié-ambassadeur est avant tout né de ce besoin de mobilisation de toutes les ressources Pourquoi serai-je un salarié 2.0 ? 

Les investissements à réaliser portent à la fois sur les compétences, sur les SI et infrastructures, sur du temps à allouer aux apprentissages et aux activités opérationnelles…

Des investissements que toutes les entreprises ne peuvent pas réaliser.

Des investissements que les candidats ne peuvent pas réaliser, souvent seuls.

 

Une belle dynamique à soutenir pour le meilleur !

 

Le progrès est le fruit du hasard, de la créativité, de la collaboration, de la volonté, du travail… Nous percevons la dynamique actuelle, l’effervescence même, autour du recrutement et du management des ressources humaines comme révélatrices des besoins à combler et des nouveaux enjeux, pour les entreprises et les personnes individuellement.

Effervescence grisante pour certains, trop bruyante ou brouillonne pour d’autres… dans tous les cas, nous avons tous, individuellement et collectivement, la possibilité de participer « au mieux » ou « au autrement » et de les orienter, par nos réflexions et nos actions.

 

Vos contributions sont les bienvenues !