Un budget de 27 milliards d’euros, une offre abondante de formations, une succession de textes de loi relatifs aux compétences et à la formation tout au long de la vie depuis dix ans, … et pourtant la formation professionnelle continue ne parvient pas à répondre aux finalités très concrètes qui lui sont assignées.


Un budget conséquent pour la formation professionnelle

Les sommes allouées à la formation professionnelle continue et à l’apprentissage s’élèvent à plus de 27 milliards d’euros selon les dernières études de la DARES, soit 1,5 % du PIB. (Source : Dares 2007 et Ministère du Travail 2009).

  • 10,5 milliards financés par les entreprises dans le cadre de leur obligation de formation,
  • 4,5 milliards par l’Etat,
  • 3,2 milliards par les régions
  • 1,2 milliards par l’Unedic.

Les dépenses correspondant aux rémunérations prises en charge sont d’environ 10 milliards d’euros, le solde d’environ 17 milliards d’euros est relatif aux coûts pédagogiques.

.

et des objectifs assignés…

La formation professionnelle continue doit principalement contribuer à :

  • Ajuster les compétences aux besoins de l’économie,
  • Renforcer la compétitivité des entreprises,
  • Réduire les inégalités d’accès à l’emploi
  • Sécuriser les trajectoires des salariés (employabilité et retour à l’emploi).

Les responsabilités respectives des entreprises et des salariés ont fortement évolué. On parle aujourd’hui du droit à la formation des salariés, de la gestion individuelle de l’employabilité, de co-responsabilité, etc. quand on parlait hier d’obligation minimale des employeurs (1971, première loi sur l’obligation de formation des employeurs).

Les évolutions économiques, démographiques et sociétales modifient aussi les attentes et les modalités de la formation professionnelle continue (comme d’ailleurs celles de la formation initiale…).

La décentralisation a conféré aux régions des responsabilités opérationnelles dans les dispositifs de formation professionnelle en lien avec les besoins économiques et sociaux des territoires.

Les branches professionnelles et les partenaires sociaux sont fortement impliqués dans l’élaboration des dispositifs et des objectifs.

.

Mais une légitimité encore faible de la formation professionnelle.

Du côté des entreprises, surtout les petites et les moyennes, la formation professionnelle n’est pas vue comme un investissement stratégique.

L’octroi d’une formation à un salarié est encore très souvent assimilé à une reconnaissance/valorisation ou à l’achat d’une paix sociale dans le cadre d’un budget imposé.

Les entreprises ont toujours le réflexe de recruter des personnes déjà formées par ailleurs, même si cette solution ne répond plus vraiment à la nature des enjeux. Bien que les approches par les compétences ne datent pas de l’obligation de GPEC, les responsables d’entreprise ont aussi des difficultés à appréhender le dispositif de formation en dynamique et à articuler les dimensions collectives et individuelles.

.

Du côté des salariés, la formation est encore vue comme relevant de la responsabilité de l’employeur. Mais aussi comme une démarche destinée aux personnes en difficultés ou insuffisances professionnelles. De nombreux adultes appréhendent par ailleurs de se confronter à nouveau à un processus d’apprentissage souvent théorique et aux évaluations associées. Ils ont l’impression de se mettre en danger… Les arguments de manque de temps, d’informations ou de programmes adaptés à leurs attentes sont souvent mis en avant. Les publics les plus formés sont aussi les salariés qui disposent déjà d’une qualification élevée.

Pour les personnes en recherche d’emploi des études ont prouvé qu’une formation professionnelle n’accélère pas le retour à l’emploi, ses apports se mesurant davantage par la durée d’emploi dans le nouveau poste, faut-il encore le trouver.

Globalement les entreprises et les salariés sont également sceptiques sur le caractère professionnalisant de la formation. L’offre de programmes (certifiants, diplômants ou non), bien que pléthorique, ne garantit pas l’acquisition de compétences utiles, mobilisables et valorisables pour l’entreprise, pour le salarié en poste ou en recherche d’emploi.

.

Des modalités de formation professionnelle qui doivent encore évoluer.

Les organismes de formation sont encore peu nombreux à innover en proposant des programmes orientés vers la professionnalisation. Les difficultés à définir et à généraliser des critères d’évaluation pénalisent la mesure d’un retour sur investissement pour l’employeur et le salarié. Si en théorie, la formation professionnelle doit permettre l’acquisition ou le développement de compétences réutilisables dans l’entreprise, les programmes de formation professionnelle proposés sont, à de rares exceptions près, encore trop coupés du terrain et favorisent peu l’acquisition de compétences opérationnelles. La valorisation et la reconnaissance des actions de formation en sont pénalisées. En parallèle, l’individualisation des parcours et la multiplication de dispositifs de formation à l’initiative du salarié génèrent de nouvelles attentes.

Des évolutions de l’ingénierie de formation, mieux adaptée à l’objectif individuel et collectif de la professionnalisation, et des innovations en matière de pédagogie destinée aux adultes sont attendues. Les nouvelles technologies et les usages sociaux constituent probablement une voie qu’il faudra continuer à explorer.

 

Des modalités de formation qui doivent encore évoluer.

Enfin, les dispositifs, outils, démarches, financements, acteurs et leurs rôles respectifs… du système français de la formation continue sont nombreux, complexes à comprendre pour les utilisateurs. CIF, DIF, POE, Apprentissage, Fongecif, OPCA, OPACIF, FPSPP, branches professionnelles, partenaires sociaux, les régions, l’Etat, le service public de l’emploi et ses satellites … S’il est effectivement complexe de planifier au niveau national et régional une politique de formation, d’allouer des ressources conséquentes provenant de plusieurs sources et d’en contrôler l’usage et l’efficacité, de répondre aux besoins qualitatifs et quantitatifs en tenant compte de la diversité des secteurs d’activité, des situations individuelles, des filières de formation et d’emploi, … pour autant le système actuel est complexe à comprendre et à utiliser et les politiques conduites peu lisibles.

.

Formation professionnelle : d’autres voies complémentaires…

Si la formation professionnelle est le dispositif phare de l’insertion et du développement des compétences, d’autres démarches peuvent aussi  y contribuer dans les entreprises, à condition toutefois de communiquer, piloter, valoriser et sécuriser, tout comme pour la formation :

  • La mobilité interne, géographique et/ou fonctionnelle, verticale ou horizontale.
  • La participation à des projets transverses en complément des missions récurrentes liées au poste occupé.
  • Le groupement d’employeurs et les compétences partagées. Il peut constituer une opportunité de renforcement ou de diversification des compétences pour les salariés et de fidélisation pour les entreprises.
  • Les partages d’expérience (les objectifs, les modalités et les livrables doivent être clairement définis, les contributions reconnues et valorisées).